Regard à droite, regard à gauche. Un surveillant qui regardait ailleurs. Tant mieux. Ah mince, il va déjà falloir faire la mise en situation... Nous nous trouvions à la piscine, partie du complexe sportif du pensionnat d'Abberline. Cette immense étendue d'eau cholrée était le paradis des nageurs... et d'autres personnes qui l'appréciaient pour d'autres raison. Le blond assis sur les gradins avec une immense guitare en faisait partie. Ce blond s'appelait Rodrigue, et comme tout les pensionnaires et même... la plupart des habitants de l'île, il était le descendant d'une ancienne créature mythique. On trouvait de tout : du zombie au loup-garou, en passant par l'ange et le démon jusqu'à l'homonculus et les divinités inférieures. Dans son cas, les tests avaient prouvé qu'il venait d'une lignée de naïades, des nymphes de l'eau. Dans la plupart des cas, l'ascendance donnait des pouvoirs... surnaturels. Dans son cas, c'état un contrôle sur l'eau, grâce au son qu'il produisait : quand il jouait d'un instrument (le mieux étant quand même son propre sitar) ou quand il chantait... Bon par contre, quand il chantait ça se terminait le plus souvent en tsunami ou typhon, donc il évitait. Un jour il apprendrait à chanter juste, peut-être

Bref, il était à la piscine pour une raison toute bête : il aimait jouer de son instrument à cordes, et se sentait bien près de l'eau. Comme il ne pouvait pas descendre jusqu'à l'océan ou aller jusqu'au lac dans la forêt, ses cours reprenant dans quelque temps, la piscine étant l'endroit le plus humide qui avait retenu son attention. Suite à une vieille histoire de services rendus, il avait un passe-droit pour les gradins. Ah oui, on restait neuf an à Abberline, qu'importe l'âge auquel on entrait. Rodrigue était en quatrième année, il commençait donc à connaître du monde eeeeet... la plupart des habitants le connaissaient. Il faut dire qu'un joyeux luron avec un sitar géant qui joue de la musique partout, ça ne passait pas inaperçu. Encore moins quand il oubliait de restreindre son pouvoir et qu'il se mettait à pleuvoir dans le hall... Ou quand on l'avait forcé à chanter la première fois... La salle avait subit un lavage complet... Bref, connu pour être un "élément à contrôle élémentaire énorme mais involontaire", le musicien était souvent surveillé, mais aimait penser qu'il était un électron libre. Voilà pourquoi il était tranquillement à la piscine : pour pouvoir jouer tranquille en espérant ne pas avoir à se concentrer pour laisser partir des jets d'eau partout.

Ah oui, bien sûr, surtout au début, les élèves étaient interdits d'utiliser leurs capacités en dehors des cours. Tout le monde passait plus ou moins outre cette règle à sa connaissance, mais mieux valait être discret et surtout ne pas en abuser. Comme il ne savait pas trop contrôler son emprise sur l'eau, Rodrigue évitait la plupart des remontrances, tout au plus lui demandait-on de ne pas ruiner les journées ensoleillées en allant chanter des oeuvres dépressives à l'amphithéâtre. Mais parfois, quand il était de bonne humeur, il pouvait provoquer neige ou créer de petits saunas. En réalité son contrôle sur l'eau non-liquide restait anecdotique, même après entraînement, cela dépendait encore totalement de son état mental. Vous allez me dire que je parle beaucoup de ses capacités extraordinaires, mais quand sa passion rentre en collision avec danger potentiel, il faut toujours faire attention... très attention. Rodrigue évitait le plus possible de faire des vagues, voulant surtout garder sa tranquillité.

Pour en revenir à son activité actuelle, il jouait tranquillement, assis au plus près de l'eau que possible. Son sitar était un peu spécial, vu qu'il était foncièrement incassable et qu'il ne craignait pas l'humidité. Il faut avouer que c'est pratique compte tenu de l'utilisateur. Bref, il révisait ses accords et en profitait pour réajuster le son de l'instrument. Les chevilles venaient tout juste d'être remplacées : l'une s'était brisée lors d'un dévalage d'escalier, et il en avait profité pour toutes les remplacer par de petits coquillages, il fallait donc raccorder l'instrument. Plus il jouait juste, meilleur était son contrôle, mais bon pour le moment, il provoquait sans s'en rendre compte de petits remous à la surface de la piscine, et de petits tourbillons en son fond. Problèmes en vue, je pense...

Accord discordant. Oui, quand on le surprenait, ses mains glissaient et il pinçait les mauvaises cordes. Le blond regarda une ou deux secondes son instrument avec un air contrarié sur le visage, puis donna un quart de tour à un coquillage-vis sur le manche. Voilà, ça serait juste maintenant ! Il releva enfin finalement la tête, pas plus pressé que cela afin de dévisager la personne qui l'avait tiré de sa rêverie mélodique. Deux grands yeux verts, une flopée de cheveux blancs sortaient de l'eau. Euuuh... Il lui semblait que c'était une des élèves qu'il avait accueilli au début de sa seconde année, pendant le programme de parrainage. Et ce qu'elle lui demandait, euuuh...

- Bon...jour ! Je suis Rodrigue, Rodrigue Miles, quatrième année.

C'était quoi déjà les autres questions ? Mince mince, mais pourquoi quelqu'un venait lui parler là maintenant tout de suite alors qu'il était tranquillement concentré sur une chose qu'il faisait limite à contre-coeur ? Bon ce n'était pas la faute d'Elena, mais bon le blond était obligé de sociabiliser pour le coup, quelque chose qu'il ne faisait normalement qu'à sa propre initiative.

- Quant à ce que je fais là... Euh ben mon sitar, oui oui, ce n'est pas une guitare, est amphibie, donc je joue où je veux, et près de la piscine c'est cool car j'aime bien l'eau, regarde...

Pour appuyer ses dires, le blond plaça deux trois accords et commença à jouer un petit morceau rapide et guilleret. La flaque d'eau à ses pieds se mit en même temps à frémir, et des petits filaments commencèrent à sauter, faisant de petits arcs lancés dans un spectacle aquatique en rythme avec les sons qui sortaient de l'instrument à cordes. Il termina par un cinq-un (une cadence parfaite) qui fit jaillir son élément en petits piliers qui retombèrent en parfaite harmonie.

- Bref voilà voilà, et toi euuuh... quoi de beau ?

Okay, il était super gêné, lui sur les gradins, elle encore à moitié dans l'eau, il y avait de quoi faire une vieille photo clichée.